Crédits photo : LNC
La candidature de Samuel Hnepeune à la présidence du Gouvernement, défendue bec et ongle par les responsables de l’Union Calédonienne, crispe le mouvement indépendantiste depuis quelques jours. Retour sur les déclarations tonitruantes de ces dernières heures.
Tout débute mercredi avec l’élection des nouveaux ministres du Gouvernement. Alors que la liste de l’UC-FLNKS Nationalistes et l’Eveil Océanien fait le plein de ses 16 voix, l’UNI comptabilise deux suffrages supplémentaires : la voix du Parti travailliste et celle d’un élu Loyaliste. Comme indiqué dans notre article de jeudi, le vote du PT a permis à l’UNI d’obtenir 3 ministres mais empêche l’UC de remporter un 4ème siège réservé à Vaïmua Muliava.
Le vote du PT a donc été décisif pour la répartition des sièges entre l’UNI et l’UC. Il permet, au grand regret des Loyalistes comme l’a noté M. Tukumuli, de consolider une majorité indépendantiste au Gouvernement avec 6 ministres FLNKS au lieu d’un schéma « 5 indépendantistes, 5 non-indépendantistes et 1 Eveil Océanien ».
D’un ton agacé, le secrétaire général de l’UC, Pierre-Channel Tutugoro, a déploré dès jeudi au micro de radio Djiido l’obtention pour l’UNI d’un 3ème ministre. Il accusait publiquement l’UNI d’avoir négocié un report de voix avec l’Avenir en Confiance dans le but de consolider la candidature de Louis Mapou à la présidence et d’asseoir une base de discussion sur l’indépendance en partenariat. Une analyse assez bancale de la part du secrétaire général de l’UC puisque dans un tel cas les ministres AEC auraient dû accorder leur vote au responsable de Yaté. Il semble, en outre, politiquement difficile pour l’AEC d’entrevoir de telles discussions au regard de ses positions fermes et radicales en faveur du maintien de la Calédonie dans la France. Le report de voix des Loyalistes constituait donc bien un vote sanction contre l’Eveil Océanien, néanmoins inutile vu la position du PT.
Le PT-USTKE ne mâche pas ses mots
Au lendemain de cette élection, Louis Kotra Uregei apportait trois raisons pour expliquer le vote de son parti. La première est un reproche fait à l’UC qui visiblement n’a jamais souhaité se concerter avec le PT pour l’établissement de sa liste. La deuxième tient à l’ADN même du parti et de son organisation sœur l’USTKE, il était donc inenvisageable de soutenir une liste portant la candidature de l’ex-patron du MEDEF. Enfin, le responsable originaire de Tiga pointe l’opportunisme d’un candidat [Samuel Hnepeune] inconnu « en tant que militant, ni de l’UC d’ailleurs, ni militant tout court » à l’inverse de Louis Mapou.
Mais une bombe est parue aujourd’hui sur les réseaux sociaux. Un courrier de 4 pages signé Louis Kotra Uregei à l’attention du secrétaire général de l’UC. Le Président du PT ne mâche pas ses mots comme à son habitude :
« Si vous aviez eu ce respect vis-à-vis d’un partenaire certes mais néanmoins indépendant, vous auriez entendu de notre part l’impossibilité de la représentante du parti créé à l’initiative de l’USTKE, 2ème organisation syndicale du pays, de voter pour le président de la fédération patronale »
« Responsable [Samuel Hnepeune] d’abord de la SEM filiale à 100% de la PIL puis ensuite d’Aircal compagnie dont l’actionnariat est à plus de 90% publique, deux structures dont les déficits quasi-permanents ont toujours été épongés par l’injection répétée de subventions publiques, je ne vois vraiment pas où Mr Samuel HNEPEUNE aurait démontré ses qualités de gestionnaire ».
« Par ailleurs, Samuel HNEPEUNE s’est illustré récemment par des déclaration tonitruantes à propos du déficit du régime assurance-chômage de la CAFAT, indiquant que la situation dégradée de cette caisse était liée aux dégradations et aux pertes d’emplois occasionnés dans le cadre du dossier de la vente de l’usine de VALE et qu’il fallait faire payer les responsables de cette situation, en l’occurrence ceux qui dirigeraient la mobilisation du collectif USUP. Quelle outrance et quelle absence de considération pour les populations proches de cette usine directement concernées […] Alors que vous-même êtes dans le collectif Mr le Secrétaire Général ainsi que d’autres responsables de l’UC, ces déclarations ne vous font rien ? Ne vous empêchent pas de le choisir à la tête de votre liste ? ».
Le PALIKA appelle à une rupture avec les politiques dictées par le patronat
La Parti de Libération Kanak a également exprimé, de manière plus subtile, son incompréhension quant à la candidature de Hnepeune imposée par l’UC. Par voie de communiqué en date du 16 février dernier, Charles Washetine appelle, en effet, à une « rupture avec le mode de gouvernance actuel et en vigueur depuis maintenant 22 ans » et ajoute que « cela suppose aussi une rupture avec les politiques publiques partisanes dictées par le patronat et les multinationales bien souvent au détriment de l’intérêt général».
L’UPM réagit également
Composante de l’UNI tout comme le PALIKA, l’Union Progressiste en Mélanésie a dénoncé aujourd’hui par communiqué de presse les incriminations du secrétaire général de l’UC sur la radio indépendantiste. Le parti affirme que « ce résultat marque surtout l’échec de la stratégie mise en place par le secrétaire général de l’UC de vouloir installer l’ex dirigeant de l’organisation patronale à la tête du gouvernement » et conclu en indiquant que « l’humilité devrait être de mise pour rechercher la meilleure manière d’y répondre tous ensemble ».
Force est donc de constater que le mouvement indépendantiste est secoué en interne depuis quelques jours maintenant. Un passage qui met à mal l’unité des partisans du OUI mais comme certains responsables ont pu l’affirmer, cette période décisive pour le pays impose peut-être de clarifier au préalable la ligne politique à tenir. Affaire à suivre.
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